
Le lion sans crinière est un roman à l’écriture riche, sensuelle, onirique. Dans ses moments paisibles, il est écrit comme est peint un tableau du Douanier Rousseau, à la fois précis, luxuriant, plein de textures et de couleur, mais aussi de parfums et de goûts. On pense à Kessel bien sûr mais surtout à Saint John Perse pour la richesse et la musicalité de la langue, à Aimé Césaire pour cette poésie des phrases, aux saveurs longues en bouche. Il y a de grandes pages virtuoses dans les descriptions, les parfums ou comme cette incroyable fuite des animaux de la savane devant le feu des massacres, quand surgit la violence, la fureur… C’est aussi et surtout une belle et juste fable, à hauteur d’homme, c’est à dire plus grands qu’eux-mêmes, sur la spirale implacable du pouvoir, les rêves, les soifs de justice qui finissent par abreuver de sang les terres meurtries. Un roman épique, violent, puissant, aux personnages et à l’univers singulier. Avec quand même quelques longueurs parfois, dans la deuxième partie. Mais quand on sait que c’est le premier roman d’un jeune homme d’une vingtaine d’années et qu’il n’a jamais mis les pieds dans cette Afrique (il y invente un pays imaginaire) où il nous entraîne avec une force de narration peu commune. Ehhh ben ! Le moins qu’on puisse dire c’est que le mec en a sous le pied ! Le lion sans crinière, Edouard Bureau, Editions sable Polaire.